UNIVERSITE de PARIS - VIII
Novembre 1985

Thèse d'Etat

Alain Montesse

L A   D I S C O R D E

(Résumé)



PART I 
L'introduction passe brièvement en revue diverses acceptions de la discorde, d'Hesiode à Charles Fourrier. Une liaison est établie avec les problématiques contemporaines d'ordre à partir du bruit. I1 apparaît que, la discorde étant universellement répandue, le corpus ne peut être que fragmenté et aléatoire. La méthode devra donc procéder par montage et raccordements, construisant des objets théoriques de magnitudes diverses. Ces objets seront ordonnés selon différentes grilles d'interprétation.




PART II 
Ici sont regroupés des objets périmusicaux divers touchant de près à la problématique de la discorde :
  - a) un survol rapide de la discorde en guerre, en politique et en économie, débouche sur la sociologie des musiciens, en particulier du microcosme orchestral, qui a pour fonction d'exprimer à la société globale son harmonie latente.
  - b) Les très nombreux travaux de ces dernières décennies portant sur la différence et l'identité, l'être et la parole, la linguistique et le silence, etc., permettent d'esquisser les rudiments d'une ontologie sonore, voire d'une métaphysique à bases musicales.
  - c) de la philosophie du Non à la sémantique générale, on arrive à la logique formelle, et à la construction d'une logique tétravalente sur l'anneau Z(1)/2Z.




PART III 
La discorde est un concept relativement peu utilisé en musique ; l'histoire de la discorde se réduit donc à l'histoire des crises qui ont affecté la musique, ou la métamusique. On passe en revue, dans l'ordre chronologique, les principales de ces crises, de plus en plus nombreuses au fur et à mesure que l'on avance dans le temps, de la querelle des irrationnels chez les Pythagoriciens, jusqu'à la crise ininterrompue dont se nourrit la musique contemporaine. I1 apparaît que cette prolifération des crises se traduit, au moins partiellement, par une ascension sur l'échelle des harmoniques dans la résonance du corps sonore.




PART IV 
S'appuyant sur la combinatoire du Yi-Ching, on construit d'abord les 64 combinaisons des six tierces majeures ou mineures. On constate que l'on reconstitue ainsi l'éventail des modes et échelles de l'harmonie classique. Dans un second temps, en ne gardant que la contrainte d'octaviation des échelles et de complémentarité des intervalles, on examine toutes les combinaisons de tous les intervalles, de la seconde mineure à la septième majeure. On aboutit ainsi aux 348 échelles tempérées possibles, de une à douze notes, dont on propose une cartographie à plusieurs niveaux.




PART V 
Les 22 figures du Tarot de Marseille servent de prétextes à autant de variations libres sur les différents sujets et personnages que présentent ces figures. Ainsi, le Bateleur introduit à l'audiovisuel musical, la Lune à urbanisme et musique, l'Impératrice aux préhistoires comparées de Don Juan et Carmen, l'Hermite à une interprétation autobiographique des Déserts de Varese, l'Amoureux à la Guerre de Troie, ses causes, et ses innombrables retombées musicales, etc.




PART VI 
On examine ici certains des rapports qu'entretiennent la musique et les sciences exactes, principalement la chimie et la mécanique quantique. I1 apparaît que la correspondance notes-planètes-métaux, sur laquelle on aura joué depuis l'antiquité, se scinde en sciences séparées (acoustique, astronomie, chimie) dès le XVIIIe siècle, mais continue de perdurer dans l'inconscient de la culture scientifique et technique. Des ouvertures sont ménagées vers l'astrophysique, les structures dissipatives, et la biologie moléculaire.




PART VII 
Récapitulant les diverses étapes et paysages parcourus, il apparaît que, si le temps de ce parcours est conçu comme une succession aléatoire de discords et d'accords, une configuration ordonnée dégénérant en désordre jusqu'à ce qu'une crise, plus ou moins imprédictible, se dénoue, catastrophiquement ou non, par l'établissement d'un nouvel accord, le hasard qui gouverne ces transformations est lié à la gravitation, donc à l'histoire. Les forces que s'exercent les unes sur les autres les masses sonores les conduisent à s'agréger, alors que les discordes internes provoquent l'auto-division de la matière sonore. Ainsi naissent les notes, et les galaxies. On conclut à la nécessité d'inviter, atout hasard, la discorde au banquet de la vie, si l'on ne veut pas risquer qu'elle s'invite elle-même ; avec ses pommes.